Après trois cycles électoraux en République démocratique du Congo, la loi électorale promulguée integre l’aspect parité homme-femme, conformément à la Constitution.
“La liste qui aligne 50% au minimum de femmes dans une circonscription est exemptée du paiement du cautionnement », souligne l’article 13 de la loi électorale en RDC. Cette nouvelle disposition légale est considérée, pour plusieurs, comme une avancée significative étant donné que le faible taux des femmes au sein des institutions électives (Assemblées nationales et provinciales, Sénat, gouvernorat) est consécutif au non prise en compte de la gent féminine sur la liste électorale. La prise en compte de l’aspect genre dans la loi électorale résulte des longs plaidoyers menés par des organisations qui sont pour les droits des femmes en RDC.
Avec la promulagation en RDC du cadre légal électoral qui integre le genre, des organisations qui promeuvent les droits des femmes et filles au pays estiment que les actions en faveur du respect des droits de la femme doivent se poursuivre. Pour une certaine opinion, le défaut de n’avoir pas érigé en obligation l’intégration du genre sur des listes électorales; nécessite des actions dont; des sensibilisations et plaidoyers pour l’application de l’article 13 sur le genre.
Mme Nathalie Yoka Chargée des Programmes du Réseau Genre et Droits des femmes et membre du mouvement Rien sans les femmes est de cet avis.
“La reconnaissance de la parité dans la loi électorale est une avancée significative”, reconnaît-elle avant de déplorer l’absence des mesures de contrainte qui devraient pousser les partis politiques à aligner effectivement les femmes.
C’est pourquoi, pour elle, en ce qui concerne les mécanismes qui peuvent être utilisés pour faire appliquer effectivement cet article, Mme Yoka a parlé de la sensibilisation et de la vulgarisation de la loi auprès des dirigeants des partis politiques pour qu’ils puissent aligner les femmes si » nous voulons voir ces femmes aux commandes », pense-t-elle.
“Il faut également faire de lobbying et de plaidoyer dans le but de rendre les partis politiques flexibles. Les responsables des formations politiques doivent booster les dames qui se trouvent au sein de leur parti politique, les former encore davantage pour qu’elles puissent briguer les mandats de députés », a déclaré Mme Nathalie.
Pour sa part, Mme Solange Riziki, Secrétaire exécutive du Réseau Femme Citoyenne Engagée, affirme aussi que cette loi est une grande porte ouverte à la femme pour accéder aux postes de prise de décisions par la voie des urnes.
Elle est en faveur du leadership politique féminin car cela, selon elle, est une grande nouvelle pour une femme ambitieuse.
Pour la mise en œuvre de cette loi lors des prochaines élections, Solange Riziki soutient que les partis politiques et les femmes activistes politiques doivent saisir cette opportunité pour que les dames adhèrent massivement dans leurs formations politiques et qu’elles y soient actives.
Elle est de même avis que Mme Nathalie Yoka, qu’il revient à la société civile de conscientiser et de sensibiliser la femme et les partis politiques pour pouvoir matérialiser la loi électorale.
Toujours dans le cadre de la concrétisation de cet article 13, son souhait est que les partis politiques soutiennent la femme financièrement pendant les élections parce que même si elle est alignée, la plupart des temps la femme n’a pas accès aux ressources. Mais aussi, poursuit-elle en disant que, la formation en leadership politique et en matière électorale s’avère nécessaire pour accompagner la femme une fois alignée.
Elle rappelle cependant que c’est au prix d’une lutte de plusieurs années, que la parité est insérée dans la loi électorale. » Quel que soit le découragement lié à plusieurs échecs levons-nous, engageons-nous avec beaucoup de foi en Dieu et en nous-même femme et par cette determination, le parlement et le sénat seront correctement représentés et la parité sera réellement effective »,affirme Solange Riziki avec un ton ferme.
Que disent les femmes politiques à propos?
La Présidente de la dynamique des femmes de pouvoir, Valérie Kabanga Kalala a également salué cette innovation apportée à ladite loi.
Elle a emis le voeu à ce que la parité homme-femme prônée dans la loi électorale soit appliquée. Raison pour laquelle, cette femme politique a appelé ses pairs à s’organiser. « A l’intérieur nous devons nous arranger avec le président des partis politiques de manière à ce qu’ils puissent observer et appliquer la loi. Aussi, les femmes qui sont engagées au sein des partis et regroupements politiques, doivent être objectives parce que leur ambition est de conquérir le pouvoir et de le garder le plus longtemps possible. Donc, elles doivent insister au sein de leurs partis pour qu’il y ait le respect de cette loi qui appuie la parité ».
Députée nationale, élue de la Circonscription électorale de Lukunga, ville-Province de Kinshasa, Christine Feza Motema, se dit satisfaite par rapport à la lutte de la parité homme -femme en RDC.
« Même si nous n’avions pas obtenu une contrainte ou exigence tel que proposée, nous espérons que la loi telle qu’adoptée et promulguée à ce jour, pourra offrir à la femme une représentativité beaucoup plus large qu’auparavent », a-t-elle annoncé.
Selon elle, ça sera très coûteux pour les partis et les regroupements politiques de ne pas se conformer à la parité. Or en présentant une liste paritaire, a ajouté la députée nationale, les partis politiques ou encore les regroupements politiques seront exemptés des frais qui ne sont pas moindres.
S’agissant des Congolaises, elles ne doivent pas baisser les bras parce qu’elles n’ont pas pu obtenir des mesures de contrainte. Il revient tout simplement aux partis politiques de voir s’ils vont payer la caution ou pas.
» Ce n’est pas encore fini. Chacune dans son parti politique doit mobiliser les autres à se serrer le coude. La femme politique doit faire l’effort de rester vigilante, de poursuivre le combat », estime-t-elle.
Et de quoi espérer alors comme garde fou?
Le Coordonnateur national du collectif des avocats de la LIZADEEL, Me Liévin Gibungula Lumbidi a signifié que la garantie juridique de cette loi est qu’elle s’est conformée à larticle 14 de la Constitution prônant la parité homme-femme.
Bien qu’elle ne rejette pas la liste des partis politiques qui n’a pas respecté cette disposition, mais au moins elle donne la précision sur le nombre des femmes à aligner, a-t-il ajouté. « Cest une garantie pour les partis politiques de ne pas payer le cautionnement, surtout à la femme de se faire représenter valablement pour les élections de 2023 », a souligné Me Gibungula.
S’agissant des mécanismes qui peuvent permettre la mise en œuvre de ladite loi électorale, le juriste a insisté sur l’engagement de la femme, elle-même, qui doit montrer sa disponibilité à participer aux élections pour ne pas causer des difficultés lors du dépôt de candidatures au niveau des partis politiques. C’est ainsi que l’avocat a demandé à ces femmes de commencer la sensibilisation à leur niveau, et de prendre en charge la situation, en sachant que la concrétisation de la parité c’est d’abord leur engagement.
« Si elles ne s’engagent pas, nous serons en difficulté de parler de cette parité. Leur engagement faciliterait cette parité », a averti Me Gibungula.
Il a notamment recommandé aux femmes de créer leur propre parti politique. « C’est ce qui faciliterait cette opportunité pour que les femmes puissent aboutir à l’égalité sur la représentation homme-femme parce que ce sont les chefs de partis politiques qui établissent la liste électorale”, propose-t-il.
Mme Nathalie Yoka à proposer aussi des actions en synergie pour faire bénéficier à la femme et jeune fille congolaise, les avantages de l’article 13 de la loi électorale sur la parité homme-femme.
Pour elle, elle estime qu’ “Il est important que les médias, les Organisations des droits des femmes se mettent ensemble notamment pour faire de plaidoyer pour une large diffusion », conclut-elle.
Pour rappel, l’ONG Journalistes pour les droits humains, JDH (Journalists for human rights, JHR) une des rares organisations à avoir participée dans des actions des plaidoyers a, dans un communiqué de presse, annoncé que « c’est pour la première fois, que le genre soit implicitement pris en compte dans une loi électorale en RDC ». Cette loi est l’aboutissement des plaidoyers menés également par JHR avec d’autres organisations nationales.
S. Mbuyi, JDH.