Dans un climat de tensions croissantes entre le pouvoir politique et certaines figures influentes de l’Église catholique en République Démocratique du Congo, l’apôtre Roland Dalo, leader charismatique du Centre missionnaire Philadelphie et proche du président Félix Tshisekedi, émerge comme un acteur clé dans l’élaboration des discours et des lignes directrices politiques de la nation. En effet, sa récente prière d’actions de grâce, riche en symbolisme et révélations, témoigne d’un lien complexe entre spiritualité et politique qui mériterait une analyse approfondie.
Le message de l’apôtre Dalo : entre espoir et ambition politique
À travers ses propos durant la cérémonie du 31 décembre 2024, Dalo a su jongler entre gratitude et exigence. Sa phrase emblématique : « Nous ne voulons pas seulement des outres neuves mais nous voulons des personnes réellement renouvelées », peut être interprétée non seulement comme une aspiration religieuse, mais également comme un appel aux décideurs politiques à engager une véritable réforme. Au fond, son message résonne comme un impératif moral dans un contexte où la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des ressources sont plus que jamais d’actualité.
À cet égard, il est intéressant de noter que la RDC figure parmi les pays où le taux de corruption est l’un des plus élevés au monde. Selon l’Indice de Perception de la Corruption 2022 de Transparency International, la RDC se classe au 169e rang sur 180 pays, ce qui met en lumière l’urgence d’un renouveau non seulement politique mais aussi éthique. Ce scénario appelle à la mobilisation des religieux et des leaders d’opinion pour instaurer une culture de responsabilité et de transparence.
Une influence religieuse sur la politique : vers un modèle congolais ?
Le discours de Dalo lors de la prière d’ouverture du deuxième mandat de Tshisekedi en janvier 2024, où il a imploré : « Seigneur, nous sommes fatigués des voleurs », témoigne d’une influence religieuse croissante dans le débat public. En réalité, cette tendance n’est pas propre à la RDC. Dans de nombreux pays à travers le monde, la religion a historiquement joué un rôle de levier dans la sphère politique, de la théocratie iranienne à la politique catholique polonaise.
Cependant, le cas congolais présente une particularité. La RDC, en tant que nation profondément catholique, voit en l’Église non seulement un refuge spirituel, mais aussi un acteur politique incontournable capable de mobiliser l’opinion publique. La dynamique actuelle pourrait poser la question suivante : à quel point les leaders religieux, comme Dalo, peuvent-ils influer sur les décisions politiques tout en maintenant leur légitimité spirituelle ? Le dilemme semble se poser dans une période où le peuple congolais aspire à une gouvernance proactive et résolue, confortée par des valeurs éthiques solides.
Vers une redéfinition des rôles ?
Le défi principal réside dans la capacité de ces leaders religieux à concilier leur engagement politique avec leur mission spirituelle sans compromettre leur intégrité. La déclaration de Dalo sur les « outres neuves » pourrait, à première vue, sembler une réponse facile à la question complexe de la gouvernance. Cependant, si l’on adopte un angle critique, on pourrait s’interroger : cette approche pourrait-elle aussi se transformer en un mécanisme de légitimation pour ceux qui détiennent déjà le pouvoir ?
D’autre part, la récurrence des plaintes liées à la gestion défaillante des ressources publiques, tout en étant mise en lumière par Dalo, souligne le besoin d’un processus de transparence auquel les leaders religieux eux-mêmes devraient se soumettre. En effet, des études montrent que la corruption réduit considérablement les investissements étrangers, freinant ainsi le développement économique. Dans cette optique, l’apôtre pourrait être appelé à promouvoir un mouvement plus vaste incitant le peuple à exiger des gouvernants des comptes.
Conclusion : une rapprochement entre spiritualité et politique au service du peuple congolais
Avec les défis socio-économiques et sécuritaires persistants auxquels la RDC est confrontée, il apparaît clairement que les déclarations de figures influentes comme Roland Dalo peuvent soit servir de catalyseur pour un changement tangible, soit contribuer à une stagnation si leurs promesses ne sont pas suivies d’actions concrètes. Dalo a la possibilité d’élever le débat en orientant ses engagements vers un appel à l’activisme citoyen, plutôt qu’à un soutien inconditionnel au pouvoir politique.
La conjonction de la spiritualité et de la politique présente tant des opportunités que des défis. À mesure que le pays se dirige vers une nouvelle année, il sera intéressant d’observer si ce cocktail de foi et de gouvernance peut réellement produire des effets concrets pour améliorer le quotidien des Congolais. Si l’Église et le pouvoir continuent de se confondre, les attentes du peuple devront être constamment réévaluées pour garantir que cette évolution est véritablement au service d’une meilleure gouvernance, en évitant l’écueil d’une instrumentalisation de la foi au profit d’intérêts politiques privés.
Fatshimetrie avec CONGOACTU