Le Constituant du 18 Février 2006 a prévu deux possibilités de gouvernance, dans le cadre de notre régime politique, dit semi-présidentiel. Il s’agit de la Coalition, qui est une mise en commun, préélectorale ou post-électorale, de vision ou projet politique, des forces politiques et des élus ou d’une Cohabitation, qui est la non-mise en commun des éléments cités ci-haut, sur fond principalement de fortes divergences sur les politiques publiques à mener.
Cependant, après les élections chaotiques de Décembre 2018, Mr J. Kabila et Mr F. Tshisekedi ont tissé une alliance, qui ne réunit ni les éléments d’une coalition, ni ceux d’une cohabitation tels que prévus dans la constitution du 18 Février 2006.
Nous allons analyser dans les prochaines lignes, s’il ne s’agirait tout simplement pas entre le FCC et le CACH, d’une Collision permanente (accident apparent entre deux forces politiques aux politiques publiques différentes), sur fond d’une Collusion (entente sécrète ou Deal entre J. Kabila et F. Tshisekedi pour tromper le peuple, au profit de leurs intérêts personnels).
1. La Coalition selon le Constituant du 18 Février 2006
Il y a deux hypothèses de coalition, au regard des dispositions de la Constitution du 18 Février 2006 : une coalition préélectorale (A) et une coalition post-électorale (B).
A. Coalition pré-électorale
Le législateur a opté pour la proportionnelle comme mode de scrutin des législatives nationales, rendant quasi-impossible, l’obtention par un parti politique, de la majorité parlementaire.
Ainsi, un Parti politique ou un candidat-Président de la République, qui a l’ambition de gouverner le pays, est obligé de faire des alliances préélectorales, mieux de constituer une coalition. Après les élections, cette coalition peut remporter la présidentielle et obtenir la majorité parlementaire, pour se constituer en coalition majoritaire, au regard de l’article 78 de la Constitution. Le Constituant prévoit dans ce cas, la nomination d’un informateur par le Président de la République, en vue d’identifier ladite coalition, ce qui suppose, ressortir la volonté des partis et regroupements politiques de ladite coalition de travailler ensemble, autour d’un même projet politique, mettant en commun leurs élus.
Après les élections de 2006, malgré la signature d’un protocole d’accord entre la MP de J. Kabila et le Palu d’Antoine Gizenga, J. Kabila, proclamé élu Président de la République avec la majorité parlementaire MP-PALU, a préalablement désigné Gizenga comme informateur, avant de le confirmer comme Premier Ministre.
B. Coalition post-électorale
La coalition post-électorale suppose l’élection d’un Président de la République, venant d’une force politique différente de celle qui a remporté la majorité parlementaire. Les deux forces politiques sont supposées, avoir présenté des projets politiques différents au peuple.
Le Président élu, désireux de gouverner le pays, peut engager des pourparlers, via sa formation politique avec le détenteur de la majorité parlementaire pour constituer une coalition.
De manière formelle, il désigne un informateur dont la mission est d’identifier les formations politiques et leurs élus, autour d’un projet politique commun, qui est généralement le projet du Président, celui qui a été élu directement par le peuple, dans une circonscription plus grande. Ce projet politique est en principe le résultat des concessions mutuelles donc d’une synthèse.
2. La Cohabitation selon le Constituant du 18 Février 2006
Après les élections, deux forces politiques divergentes peuvent avoir, une, la majorité présidentielle (le Président élu) et l’autre, la majorité parlementaire. Si elles ne décident pas de coaliser, elles ouvrent la voie à la cohabitation.
Dans ce cas, le régime politique virerait vers sa stricte nature, d’un régime parlementaire, où le Président devrait jouer un rôle effacé et laisser le gouvernement, piloté par le Premier Ministre, produit de la majorité parlementaire, gérer le pays. Le Président de la République jouerait un rôle dans les domaines de collaboration (défense, sécurité et affaires étrangères) mais pour ne pas créer l’ingouvernabilité du pays, laisserait la gestion à la majorité parlementaire.
Que dire de la coalition FCC-CACH ?
La coalition FCC-CACH ne réunit ni les éléments d’une coalition, ni ceux d’une cohabitation.
I. Le FCC-CACH n’est pas une coalition, puisqu’il n’y a :
Ø aucune mise en commun des forces politiques.
Des militants aux cadres, voire responsables au plus haut sommet de différentes forces politiques de la coalition, PPRD, UNC, UDPS etc., que des quolibets sont jetés les uns envers les autres. Des manifestations aux escalades verbales, rien ne démontre la mise en commun dédites forces politiques.
Ø Aucune mise en commun des élus.
Le 06 Mars 2019, J-M Kabund, pour le compte du Cach et Néhémie Mwilanya pour le compte du Fcc, ont signé un communiqué dans lequel, ils signifiaient que seul, le Fcc détient la majorité parlementaire et non la coalition FCC-CACH. Ainsi, F. Tshisekedi devait nommer le Premier Ministre, désigné par Joseph Kabila, responsable du Fcc, détenteur de la majorité parlementaire. C’est sur base de ce communiqué, que F. Tshisekedi ne désignera pas d’informateur censé formellement constater l’existence du FCC-CACH comme coalition majoritaire à l’Assemblée Nationale. Malgré sa promesse ferme à Namibie de désigner un informateur, le FCC a contraint Mr F. TSHISEKEDI, à ne le reconnaitre que leur formation politique, comme majorité parlementaire, qui consentait cependant, constituer un gouvernement avec le Cach (Communiqué conjoint FCC-CACH du 06 Mars 2019).
Ø Aucune mise en commun de projet politique.
La coalition FCC-CACH n’a jamais établi un programme commun. A la veille de son investiture, le Premier Ministre ILUNGA ILUNKAMBA a produit une déclaration de politique générale, beaucoup plus littéraire, sans se référer aux multiples promesses de F. Tshisekedi. Après l’adoption du Programme du gouvernement par le P.m ILUNGA ILUNKAMBA, Mr Félix Tshisekedi a lancé le Mercredi, 16 octobre 2019, son programme accéléré de lutte contre la pauvreté et les inégalités en Rdc, sans aucun lien avec le programme présenté par ILUNGA ILUNKAMBA. Dans la gestion, c’est la cacophonie totale. Les ministres Cach et la Présidence de plaignent de manière permanente, d’être bloqués par les Ministres du Fcc. Le Directeur de cabinet de Mr F. Tshisekedi, Mr V. Kamerhe s’est plaint du blocage des finances pour les travaux et du refus d’octroi des crédits aux opérateurs économiques par le Ministre de Finances. Ce dernier, lui rétorque que pour l’octroi des crédits aux opérateurs économiques, c’est un mensonge, il a sollicité juste l’autorisation préalable d’octroi des crédits aux entités publiques et en rapport avec le programme du FMI et aux faibles recettes mobilisées, il applique la rigueur dans la gestion des finances publiques. Les cas sont légion, démontrant que la coalition FCC-CACH n’a pas un projet commun pour le pays, dont le plus ridicule, c’est la jérémiade de Mr Félix Tshisekedi à Londres, disant que les Ministres Fcc, ont déjà signé des lettres de démission, sur instigation des autorités du Fcc, pour le bloquer.
II. Le FCC-CACH n’est pas non plus une Cohabitation.
Visiblement, les deux forces politiques ont refusé d’aller en cohabitation, c’est-à-dire Mr Félix Tshisekedi n’a pas voulu laisser la majorité parlementaire Fcc, gouverner seule. Cependant, la pratique démontrerait que nous sommes dans un mode de gouvernance, très proche de la Cohabitation que de la coalition.
III. FCC-CACH : une Collision sur fond d’une Collusion.
La coalition Kabila-Tshisekedi est beaucoup plus un duo sous les apparences d’un Duel. Les deux personnalités ont accepté de donner l’impression d’une Collision (d’un Duel permanent), or en réalité, ils tiendront toujours à maintenir leur Deal, la Collusion (entente sécrète signée à Kingakati), sur le dos du peuple et contre le peuple. La stratégie selon la coalition FCC-CACH, consisterait à tromper l’opinion, qu’ils sont en guerre, permettant à l’Udps de contrôler ses combattants, face à l’incapacité de résoudre les problèmes du pays, voire de donner des emplois aux dits combattants. Le Fcc et J. Kabila devraient être pointés du doigt comme bouc-émissaires, aux fins de permettre à l’Udps, de ne pas perdre la base, qui a du mal à digérer cette alliance avec Kabila. Le Fcc qui aurait toujours mobilisé sa clientèle politique, sur base de l’argent et de fabrication des résultats électoraux ne se sentirait pas trop dérangé par cette attitude.
Au fond, il restera toujours un Deal, une collusion entre les deux personnalités, qui savent, avoir contourné les vrais résultats électoraux venant des urnesbde 2018.
Malgré les différentes menaces de Mr F. Tshisekedi prononcées contre le Fcc, il finit toujours par reculer. De la désignation d’un informateur, au déboulonnage du système dictatorial, à la dissolution actuelle de l’Assemblée nationale. Toutes ces menaces paraissent comme des pétards mouillés.
Quelles sont les conséquences fâcheuses de cette collision FCC-CACH sur fond d’une Collusion Kabila-Tshisekedi ?
La cacophonie au sommet de l’État, l’incompétence et la mégestion que nous offre la coalition FCC-CACH, ont produit une crise multidimensionnelle. Un an au pouvoir, le FCC-CACH nous a produit une crise sociale intenable. De grandes affaires présumées de corruption, concussion et détournement, dépassements budgétaires, non-respect de la chaîne de la dépense et de l’appel d’offres pour les marchés publics, bénéficient à ce jour d’une grande impunité (15 millions de dollars des pétroliers producteurs, 200 millions de Gécamines, le Financement des sauts de mouton etc.)
Sur le plan social, les conséquences ne se font pas attendre :
1. Dévaluation du Franc congolais par rapport au dollar (1$= 1750 FC),
2. Perte du pouvoir d’achat de la population,
3. Flambée des prix des biens de première nécessité dans les marchés ;
4. Hausse des frais académiques dans les universités et instituts supérieurs de l’Etat,
5. Réduction des salaires sous prétexte de prélèvement de l’Impôt professionnel sur les rémunérations,
6. Des frais modiques de fonctionnement des écoles de l’Etat, difficilement décaissés,
7. Des travaux publics inachevés et mal construits etc.
Le FCC-CACH constitue véritablement une Collision aux effets néfastes incalculables aussi bien sur l’économie du pays que sur le social du peuple. Ce spectacle de cacophonie au sommet de l’Etat fait fuir les vrais investisseurs, pour attirer des coopérants.
Ce qui est pire, c’est le fait que cette collision apparente cacherait une collusion, deal entre Mr Joseph Kabila et Félix Tshisekedi, qui veulent se maintenir au pouvoir contre la volonté du peuple.
Le peuple congolais devrait exiger et obtenir la dissolution de l’Assemblée Nationale et la démission de Mr F. Tshisekedi, mais surtout les réformes structurelles, préalablement aux élections générales anticipées, pour mettre fin à sa misère, produit de la Collision FCC-CACH et de la Collusion Kabila-Tshisekedi.
Le Plan de sortie de crise dont l’objectif est de faire du peuple, l’unique souverain dans notre pays, construirait un État démocratique et républicain, capable de développer la RDC et de mettre fin à la misère du peuple.
Fait à Kinshasa, le 03 Février 2020
Me Steve KIVWATA
Avocat au Barreau de Kinshasa/Matete
Le Patriote.