Entretien avec Monsieur Christian Mayombe, Économiste et libre penseur.
Depuis quelques jours, nous suivons tous dans les médias et les réseaux sociaux la diffusion des procès publics dans lesquels sont jugés publiquement des jeunes (garçons et filles) impliqués dans des affaires de kidnapping, d’insécurité et de trafic d’organes.De prime abord, nous tenons à saluer la bravoure des services de sécurité (police, ANR, etc.) pour ce grand coup de filet régalien, ainsi que la justice congolaise pour la rigueur avec laquelle elle applique le droit.
Cependant, ces récents événements font naître en nous beaucoup de questionnements quant aux réels impacts de ces procès publics, ainsi que sur la réelle culpabilité de ces criminels qui nous ont été présentés.
Nous souhaitons également savoir si les sentences prononcées seront véritablement mises en application. Enfin, à la lumière de tous ces questionnements et analyses qui en découlent, nous allons proposer des pistes de solutions.Primo, en ce qui concerne le réel impact de ces procès publics, grande est notre déception de constater la tournure humoristique et simpliste qu’a prise ce procès dans l’esprit de la population, au lieu d’inspirer la crainte de la justice.
En effet, nous avons vu des prévenus insouciants dont l’expression faciale ne reflétait aucunement cette remise en question qui devrait s’exprimer dans ce genre de situation.À titre d’exemple, nous avons observé un présumé se faisant appeler « B-boys » faire le malin devant toute une cour de justice en affirmant librement qu’il aurait cambriolé la maison d’un citoyen par désir de vengeance pour son idole (une star de la musique congolaise) que ce citoyen, lui aussi musicien, aurait insulté. Malheureusement, cette séquence est reprise et commentée dans les réseaux sociaux comme un banal divertissement, au risque de banaliser la criminalité auprès de nos jeunes, cette jeunesse qui constitue pourtant le Congo de demain.Secundo, en ce qui concerne la réelle culpabilité des criminels qui nous ont été présentés, notre soif de vérité est grande, car les faits qui leur sont reprochés, notamment le trafic d’organes humains, impliquent nécessairement un large réseau, au vu de la logistique que nécessite ce genre d’activité criminelle. Raison pour laquelle nous nous posons la question de savoir si ce procès public n’a pas principalement pour objectif d’apaiser la colère de la population, au lieu de chercher réellement à combattre la criminalité dans notre pays.En toute logique, le trafic d’organes, par exemple, nécessite un savoir-faire approprié qui est l’apanage des seuls médecins ou de ceux qui y sont entraînés. Ensuite, cette activité criminelle requiert des modes de transport appropriés, tant sur le plan national qu’international. Cela implique nécessairement plusieurs corps de métier et catégories de personnes, mais pas uniquement ces jeunes plaisantins que nous avons vus à la télévision. Cela étant, nous nous posons la question de savoir s’il existe des hangars secrets réservés pour ce genre d’activités macabres, avec l’implication de médecins corrompus, s’il existe des complices très haut placés pour couvrir et faciliter ce commerce criminel. À ces questions, peut-être n’aurons-nous jamais de réponses, à moins que la justice congolaise, ainsi que ses différents services de sécurité, ne nous prouvent le contraire.Entre-temps, grande est notre stupeur de tomber sur tous ces témoignages de personnes prétendument rescapées du trafic d’organes. Des scènes de terreur décrites avec effroi circulent sur les réseaux sociaux, par des victimes visibles et identifiables.
Parmi ces nombreux témoignages, nous avons été principalement touchés par une victime prétendant avoir aperçu, pendant sa séquestration, dans ce qu’elle appelle une sorte de salle d’attente de la mort, un homme de race blanche, avec des gants ensanglantés, qui ne s’exprimait ni en français, ni en anglais, mais dans une autre langue qu’elle ne maîtrise pas.Voilà pourquoi nous invitons les différentes forces de l’ordre à prendre contact avec ces victimes, au cas où cela n’aurait pas déjà été fait, afin de mettre en lumière ce sombre trafic criminel dans lequel seraient impliqués apparemment de nombreux acteurs tant nationaux qu’internationaux.
Tertio, en ce qui concerne l’application effective des sentences prononcées par les juges, nous avons également beaucoup de doutes quant à leur applicabilité.
Notre scepticisme est nourri, entre autres, par les affirmations de certains prévenus multirécidivistes, qui affirment librement avoir été condamnés à plusieurs reprises, sans pour autant purger les peines qui leur ont été prononcées.À la lumière de tous les faits évoqués ci-dessus, nous nous adressons à la population et aux autorités :À notre population, nous demandons de ne pas prendre tout à la légère et d’éviter de transformer cela en divertissement. Car le kidnapping, l’insécurité et le trafic d’organes sont des drames, et non des blagues.
Nous invitons également la population à ne pas se comporter en victimes faciles, en dénonçant vigoureusement tout acte ou comportement suspect, sans aucune complaisance.À nos autorités, principalement la justice et les forces de sécurité, nous les exhortons à prêter une oreille attentive aux différents témoignages publiés sur les réseaux sociaux, afin de distinguer le vrai du faux. Nous suggérons également un suivi particulier quant à l’application effective des peines prononcées contre chaque personne jugée coupable, cela afin de décourager les futurs candidats au crime.
Dans le même ordre d’idées, nous suggérons aux autorités de penser à l’agrandissement et à l’amélioration de la capacité carcérale de la RDC d’une part, et d’autre part, de penser à l’amélioration du niveau de vie de la population en termes d’opportunités et d’emplois. Sinon, ce serait comme soigner une fièvre due à la malaria uniquement avec de l’aspirine, alors que l’origine de ladite fièvre demeure intacte.Enfin, nous encourageons la poursuite des enquêtes en cours, afin de mettre en lumière la partie cachée de l’iceberg, car il est très clair que de nombreuses personnes et de nombreux corps de métier sont impliqués dans ce vaste réseau criminel.Que Dieu bénisse la conscience collective de notre peuple afin que la République démocratique du Congo décolle véritablement et que Kinshasa, notre capitale, surnommée « Kin la belle », soit véritablement belle dans son corps et son âme.
Monsieur Christian Mayombe Mitsu Économiste et libre penseur.
Pour la Rédaction