Gouverneur honoraire de la Province Orientale de 2013 à 2015, puis celle de l’Ituri de 2019 à 2021, Jean Bamanisa Saidi a observé minutieusement l’évolution de la situation générale de l’Est de la RDC et, particulièrement, celle de l’Ituri. Aussi tire la sonnette d’alarme sur cette question qui risque de prendre une autre tournure dans l’avenir si rien n’est fait.
« Cette situation a un impact négatif sur l’économie du pays. L’exploitation illicite des bois, des cacaos, de l’or de l’Ituri qui traversent les pays frontaliers passent par groupes armés locaux et étrangers. Les populations locales sont divisées suite au communautarisme encré dans leur vécu quotidien par ceux qui se disent les leaders communautaires. Aucune tribu ne veut accepter une autre tribu, ce qui fait que le mal est très profond et il faut multiplier des stratégies pour mettre fin à cette situation », indique Jean Bamanisa Saidi.
Il fait savoir en outre que cette démarche de la pacification de l’Ituri qui compte une vingtaine de communautés demande l’implication de tous et avant tout des fils et filles même de l’ituri.
« Dans certains coins de l’Ituri, on apprend déjà à des enfants à partir de l’école primaire qu’une autre communauté est mauvaise. Les groupes de rébellion locale tel que Codeco inculque aux jeunes des pratiques mystico-religieuses pour leur faire croire qu’ils sont fort plus que tout le monde. Ceux qui sont à la tête de ces groupes armés en font de l’argent, car ils exploitent illicitement des terres qu’ils contrôlent au détriment de l’État congolais », rajoute-t-il
Jean Bamanisa qui fut gouverneur de l’Ituri, avant l’état de siège, croit que la fin de ces hostilités dépend d’une approche participative et inclusive des toutes les communautés de l’Ituri qui doivent conjuguer pour une cohabitation pacifique sans laquelle l’ennemi venant de l’étranger ne fera que profiter de cette situation pour piller cette province remplie des potentialités agro-pastorales et riche en sous-sol.
« Aujourd’hui, les Banabwisha qui constituent une tribu venue du Nord-Kivu se sont réfugiés en Ituri et sont devenus le bouclier des rebelles ougandais ADF, juste pour des raisons d’occupation des terres. Et ils s’affrontent régulièrement aux rebelles FRPI qui font front à leur présence là », précise-t-il.
La province de l’Ituri, située à l’Est de la RDC, à la frontière avec le Sud-Soudan et l’Ouganda, est devenue une province où les tueries en masse sont monnaie courante, avec pour cible les populations des cités, villages tout comme dans des camps de réfugiés.
Cette situation qui prend les allures d’un génocide découle du communautarisme profond développé par les différentes tribus sous influence des tierces personnes, soit pour des fins des occupations des terres agricoles, soit pour des fins d’exploitation illicite des minerais, des bois…et aussi pour des fins politiques.
Par ailleurs, l’on note la circulation de plus de 4.500 armes en Ituri et cela accroît du jour au lendemain, car lorsque les rebelles attaquent les Forces Armées de la République démocratique du Congo, leur stratégie première est le vol d’armes et aussi de tenues militaires.
Beaucoup d’armes sont également entrées en Ituri suite aux situations d’insécurité qui ont sévi dans le passé vers les années 1980 en Ouganda et au Soudan à l’époque.
La solution à la paix en Ituri passe par une approche locale et aussi sous-régionale qui va appeler les communautés au “vivre ensemble”.
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